Les origines du système de retraite par répartition en France

Depuis le début de l’année 2023, une réforme des retraites est initiée par le gouvernement Élisabeth Borne à la suite de celle portée en 2020 par le gouvernement Édouard Philippe et suspendue en raison de la pandémie de Covid-19. Adopté le 16 mars 2023, le projet de loi prévoit, entre autres, un report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et une augmentation du nombre de trimestres cotisés à 43 annuités. Ces mesures viennent impacter le système de retraite par répartition que connaît la France depuis 1946.

Un système par répartition signifie que les actifs paient les pensions des retraités.

Parallèlement à la contestation, quelques voix s’élèvent pour réclamer un changement de système de retraite et un passage vers un système par capitalisation, à savoir un système où chacun prépare sa retraite.

Nous avons décidé de revenir sur les origines du système par répartition.

Les retraites ouvrières et paysannes en 1910

En France, l’histoire de la retraite remonte au XVIIe siècle. En 1673, le plus ancien des régimes sociaux est fondé sous Colbert, dans le but d’apporter un soutien aux marins blessés ou invalides. Mais ce n’est qu’au début du XXe siècle que le système de retraite tel que nous le connaissons aujourd’hui commence à se mettre en place.

En 1910, alors que les régimes de retraite existants concernent essentiellement les fonctionnaires, naît en France l’idée d’un droit à la retraite pour tous les salariés. Cette idée prend corps avec la loi du 5 avril 1910 instituant un nouveau système : les retraites ouvrières et paysannes (ROP).

Semblable à celui édifié en Allemagne entre 1883 et 1889 par Bismarck, ce régime fonctionne selon le système par capitalisation. Dans la France d’alors, dominée par les valeurs bourgeoises, la retraite est perçue comme le fruit d’un effort d’épargne individuel et non comme un mécanisme collectif de redistribution. Le pays vient de connaître un siècle de stabilité monétaire et la « rente » française est florissante.

Les employeurs et les salariés doivent cotiser chaque année un montant forfaitaire sur un compte individuel dont le capital leur garantit le versement d’une rente à 65 ans et au terme de 30 annuités. La loi est loin de faire l’unanimité, notamment côté employeurs. En 1911, soit 1 an après sa promulgation, la Cour de cassation en casse le caractère obligatoire.

La CGT, hostile à la loi, dénonce une « retraite des morts » : à l’époque, 8 % seulement de la population atteignent 65 ans ; l’espérance de vie moyenne des ouvriers est de 48,5 ans. En 1912, l’âge de la retraite est à son tour modifié et ramené à 60 ans.

Les deux guerres mondiales sonnent le glas du système par capitalisation

En 1914, quatre années après l’institution du nouveau système de retraite, la Première Guerre mondiale éclate. Les hommes sont mobilisés pour la guerre et le nombre de cotisants s’effondre. La Seconde Guerre mondiale cause une inflation galopante, aggravant la misère de bon nombre de personnes âgées. Malgré différents mécanismes élaborés pour redresser la barre, le système par capitalisation imaginé par le législateur ne tient pas ses promesses. Et la France, à l’instar d’autres pays européens, passe progressivement à un nouveau système de retraite.

Le système par répartition

En 1941, sous le régime de Vichy, René Belin crée « l’allocation aux vieux travailleurs salariés » (AVTS). L’objectif est de garantir aux travailleurs de 65 ans et plus un minimum de pension, indépendamment des cotisations versées. Cette allocation est financée par les fonds de retraite capitalisés depuis 1930 et devenus excédentaires en l’absence d’amélioration des conditions de règlement des pensions.

Ce régime par répartition est consolidé par l’ordonnance du 4 octobre 1945 qui annonce la création d’une « organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent ». Les cotisations des actifs servent à payer immédiatement les retraites, tout en leur ouvrant des droits pour leur future retraite.

Le 26 avril 1946, une loi est votée pour étendre le bénéfice de la Sécurité sociale à l’ensemble de la population. Il s’ensuit, au fil des années, de nombreux textes de loi qui font évoluer la retraite dans notre pays. Nous pouvons citer notamment :

  • la signature en 1947 d’une Convention collective créant les retraites complémentaires pour les cadres du commerce et de l’industrie ;
  • la création en 1949 du régime de retraite des agents non titulaires de l’État (devenu IRCANTEC en 1971) ;
  • la création de l’ARRCO en 1961 ;
  • les ordonnances de 1967 prévoyant la création de 3 caisses autonomes, dont la CNAV.

Depuis 1982, de nombreuses réformes sont mises en œuvre pour adapter le système à l’évolution de la démographie et aux conditions de vie au travail.

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