Un salarié peut-il refuser une mutation ?

En tant que salarié, vous devez vous soumettre aux décisions de votre employeur. Or, l’une des décisions que la loi l’autorise à prendre, c’est de vous muter vers un nouveau poste ou un autre lieu de travail, lorsqu’il juge cela nécessaire pour les activités de son entreprise.

Pouvez-vous vous y opposer ?

Mutation : définition et but

On entend par mutation le fait, pour un salarié, de changer de poste de travail et/ou de lieu de travail. En effet, on peut parler de mutation lorsque le salarié change simplement de poste, mais aussi lorsqu’il change de lieu de travail (mutation géographique) tout en conservant son poste.

Une mutation peut aussi bien être à l’initiative de l’employeur qu’à celle du salarié. Mais la plupart du temps, c’est l’employeur qui prend cette décision :

  • dans le cadre d’un déménagement de l’entreprise (mutation géographique)
  • dans un contexte d’évolution professionnelle (mutation fonctionnelle)
  • pour un motif économique
  • à titre disciplinaire, dans le but de sanctionner un comportement fautif du salarié ou un manquement à ses obligations contractuelles (mutation disciplinaire).

Selon la nature de la mutation, le salarié peut être contraint de l’accepter.

Mutation géographique : le refus peut constituer un motif de licenciement

Si votre employeur vous propose une mutation que vous déclinez, votre refus peut constituer un motif suffisant de licenciement. Cela dépend de la présence, ou non, d’une clause de mobilité dans votre contrat.

Mutation en l’absence d’une clause de mobilité dans le contrat

Si aucune clause de mobilité n’est prévue, alors le lieu de travail mentionné dans votre contrat n’a qu’une simple valeur informative, à moins que votre contrat ne précise expressément que vous travaillerez exclusivement dans ce lieu. Si tel n’est pas le cas, on distinguera deux situations :

  • Vous êtes muté(e) dans un lieu situé dans le même secteur géographique que votre lieu initial de travail : dans ce cas, votre employeur peut tout à fait vous imposer la mutation. Si vous la refusez, vous pouvez écoper d’une sanction pouvant aller jusqu’à votre licenciement. En effet, selon les juges de cassation, un refus dans de telles conditions peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cour de cassation, 9 juillet 2015, n° 14-17.675). En revanche, la faute grave ne pourra être retenue (Cour de cassation, 11 mai 2005, n° 03-41.753).
  • Vous êtes muté(e) dans un lieu situé dans un secteur géographique différent de celui de votre lieu initial de travail : dans un tel cas, votre accord est requis. Vous avez donc le droit de refuser la mutation et votre refus ne peut justifier votre licenciement. Dans le cas où votre employeur vous licencierait, vous pourriez saisir les prud’hommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En cas de litige, c’est aux juges qu’il revient de déterminer si la mutation proposée est dans le même secteur géographique ou pas. Ils s’appuient sur des éléments tels que la distance entre l’ancien et le nouveau lieu, le rallongement du temps de trajet à prévoir ou encore les facilités de transport.

Mutation en présence d’une clause de mobilité dans le contrat

Une clause de mobilité dans le contrat de travail signifie que le salarié accepte à l’avance de changer de lieu de travail si son employeur juge cela nécessaire. Pour être valide, cette clause doit respecter certaines conditions. Elle doit :

  • être écrite
  • être à la fois indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise et proportionnelle au but recherché
  • ne pas permettre à l’employeur d’étendre unilatéralement sa portée
  • être justifiée par la nature de l’emploi et définir précisément la zone géographique concernée.

Lorsque cette clause existe et qu’elle est valide, vous ne pouvez pas refuser une mutation proposée par votre employeur. Votre décision, dans un tel cas, constituerait un manquement à vos obligations contractuelles et pourrait même constituer une faute grave en cas de refus réitérés.

Toutefois, votre employeur doit vous avertir suffisamment à l’avance lorsqu’il décide de faire jouer la clause de mobilité. Autrement, il ne pourrait sanctionner votre refus. Dans certains cas, il doit même obtenir votre accord :

  • si la mutation doit entraîner une baisse de votre rémunération
  • si la mutation doit entraîner un passage du travail en heures de jour à des heures de nuit, ou inversement.

Certaines conventions collectives peuvent prévoir une clause de mobilité applicable aux contrats de travail. On parle de clause de mobilité conventionnelle. Si une telle clause existe, elle peut vous être appliquée dans les conditions prévues par la convention, mais à condition que vous ayez été informé de son existence à votre embauche et que vous ayez été mis en mesure d’en prendre connaissance (Cour de cassation, 27 juin 2002, n° 00-42.646).

Cas des mutations économiques et disciplinaires

Mutation économique

Lorsque votre employeur fait face à une difficulté économique, il peut décider, dans le cadre de son obligation de reclassement, de vous proposer un poste impliquant une modification de votre lieu de travail. Le but est de sauvegarder votre emploi.

Dans un tel cas, vous ne pouvez vous opposer à la mutation. Autrement, vous pouvez être licencié, non pas parce que votre refus constitue un manquement à vos obligations, mais simplement en raison du motif économique ayant conduit votre employeur à proposer une telle mutation.

Mutation disciplinaire

Si le règlement intérieur applicable au sein de votre entreprise prévoit la mutation disciplinaire dans l’échelle des sanctions, cette mutation peut être prononcée par votre employeur si vous commettez une faute pour laquelle elle est prévue.

En cas de refus de votre part, votre employeur peut prendre une nouvelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement si le manquement initial le justifie.

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