Que dit la loi à propos de la réintégration des salariés

Lorsqu’un salarié est licencié injustement, il obtient souvent le versement de dommages et intérêts. Le juge ordonne cette indemnisation en réparation du préjudice causé.

Ce n’est pourtant pas la seule option prévue en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. La loi en prévoit une seconde : la réintégration du salarié licencié.

En quoi consiste cette réintégration ? Quelles sont ses règles ? Nous vous donnons ici quelques éléments de réponse.

Réintégration des salariés : une mesure rarement appliquée !

La réintégration du salarié est prévue à l’article L1235-3 du Code du travail :

Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Autrement dit, le salarié licencié abusivement peut non seulement retrouver son poste dans l’entreprise, mais il lui est également versé tous les droits auxquels il aurait pu prétendre s’il avait été maintenu à son poste.

Dans la pratique, cette mesure est très rarement — voire jamais — mise en œuvre. Pour la simple raison qu’elle se heurte à une autre condition posée par la loi : l’accord des parties. En effet, l’alinéa 2 du même article dispose :

Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur.

L’opposition de l’une des parties à la réintégration constitue donc un obstacle rédhibitoire. Or, si licenciement il y a, c’est que l’employeur à l’origine de cette rupture unilatérale de contrat a la ferme intention de se séparer de son salarié, encore plus si le licenciement est abusif.

Le salarié licencié injustement peut donc exprimer sa volonté de retrouver son emploi, mais cette volonté n’est jamais partagée par l’employeur. La seule solution reste l’indemnisation.

Réintégration des salariés : une solution qui s’impose en cas de licenciement nul

Si la réintégration des salariés n’est jamais la solution appliquée par le juge en cas de licenciement abusif, elle est en revanche la seule solution en cas de licenciement nul. En effet, conformément à la loi, lorsque la juridiction prud’homale prononce la nullité du licenciement, cela a pour conséquence son anéantissement rétroactif. La réintégration du salarié devient donc de droit et s’impose alors à l’employeur.

Mais les cas où le juge peut prononcer la nullité du licenciement sont très limités. Ils résultent soit du Code du travail, soit de précédents jugements retenus par la jurisprudence. Ces cas sont essentiellement ceux des licenciements ayant pour cause :

  • une discrimination en raison des origines, de l’état de santé, d’une action en justice… (articles L1132-1 et L1132-2) ;
  • une maladie professionnelle ou un accident de travail (article L1226-15) ;
  • un harcèlement sexuel ou moral (articles L1152-2 et L1153-4) ;
  • le signalement d’une alerte (articles L1132-3-3 et L1132-4) ;
  • un état de grossesse ou la maternité (articles L1225-1 à L1225-6) ;
  • la nullité d’un plan de sauvegarde de l’emploi (L1235-11) ;
  • la violation d’une liberté fondamentale ;
  • la violation du statut protecteur d’un salarié investi d’un mandat de représentation du personnel (représentant du personnel, délégué syndical, candidat aux élections professionnelles, conseiller prud’homal…).

Réintégration des salariés : conséquences et réparations

Conséquences

Lorsque le licenciement est déclaré nul et que le juge décide la réintégration du salarié, l’employeur a l’obligation de respecter la décision du juge en rendant au salarié son emploi ou en lui trouvant un emploi équivalent. La seule exception à cette règle est le cas où il se trouve dans l’impossibilité absolue de procéder à la réintégration (Cour de cassation, chambre sociale, 24/6/1998, 95-44.757).

Le fait d’avoir confié à un prestataire la tâche pour laquelle le salarié était employé ne peut caractériser pour l’employeur une impossibilité absolue de le réintégrer (Cour de cassation, chambre sociale, 14/9/2016, 15-15.944). Par ailleurs, il ne saurait non plus invoquer « un caractère artificiel et déloyal de la demande du salarié » pour s’opposer à sa réintégration (Cour de cassation, chambre sociale, 25/5/2018, 16-21.542 et 7/2/2018, 16-24.834).

De même, s’il n’étend pas ses recherches aux autres secteurs géographiques, l’employeur ne peut s’opposer à la réintégration sous prétexte que l’emploi du salarié est occupé et qu’il n’en existe pas d’équivalent dans le même secteur géographique (Cour de cassation, chambre sociale, 18/2/2016, 14-23.155).

Notons pour finir que le fait d’être embauché par un autre employeur ne peut constituer une raison pour s’opposer à la réintégration du salarié (Cour de cassation, chambre sociale, 10/2/2021, 19-20.397).

Réparations

Un salarié licencié réintégré obtient réparation des préjudices subis entre la date de son licenciement et celle de sa réintégration. Son employeur est tenu de lui reverser tous les salaires dont il a été privé au cours de cette période (Cour de cassation, chambre sociale, 25/1/2006, 03-47.517).

Cela dit, doivent être déduits desdites réparations les revenus que le salarié a tirés d’une autre activité (dans le cas où il a travaillé au cours de la période pour un autre employeur), ainsi que l’ensemble du revenu de remplacement de Pôle emploi, s’il en a bénéficié au cours de cette période (Cour de cassation, chambre sociale, 12/2/2008, 07-40.413).

Toutefois, si la nullité du licenciement est prononcée en raison de la violation d’une liberté fondamentale (atteinte au droit de grève par exemple) ou d’une atteinte à un droit garanti constitutionnellement, il ne sera fait aucune déduction du revenu de remplacement (Cour de cassation, chambre sociale, 7/2/2021, 19-21.331).

Il est important pour le salarié de ne pas tarder à effectuer sa demande de réintégration auprès du juge. Autrement, il peut voir largement réduite la réparation à laquelle il a droit, pour limiter les abus de salariés qui tarderaient volontairement à demander leur réintégration en espérant que les salaires continueraient de courir :

Le salarié qui présente de façon abusive sa demande de réintégration tardivement n’a droit, au titre de cette nullité, qu’à la rémunération qu’il aurait perçue du jour de sa demande de réintégration à celui de sa réintégration effective.

Cour de cassation, chambre sociale, 13/1/2021, 19-14.050

Réintégration des salariés et Covid-19

Pour faire face à la pandémie de Covid-19, l’État français a fait adopter une loi obligeant les salariés de nombreux secteurs à se faire vacciner pour continuer à exercer leur activité.

Mais en aucun cas, la loi n’autorise les employeurs à licencier leur salarié pour ce motif. Lorsqu’un salarié concerné par l’obligation vaccinale ne présente pas son pass vaccinal, son contrat est seulement suspendu. La loi punit d’ailleurs d’une amende de 4e classe (soit 135 €) le salarié qui continue à travailler sans fournir les justificatifs de vaccination nécessaires.

Par conséquent, si vous avez été licencié pour refus de vaccination obligatoire, vous avez la possibilité de demander au juge votre réintégration à votre poste. Selon l’appréciation de votre situation par le juge, le licenciement pourra être déclaré nul et vous pourriez alors bénéficier des réparations présentées ci-dessus.

Rappelons ici que le pass vaccinal est suspendu depuis le 14 mars 2022. Il ne reste en vigueur que pour les soignants et personnels de santé. Votre employeur n’est donc plus tenu de contrôler votre pass vaccinal ni de suspendre votre contrat de travail pour refus de vaccination ou absence de pass.

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administrateur@institut-du-salarie.fr

2 commentaires/questions sur Que dit la loi à propos de la réintégration des salariés

  1. CWIAKALA 3 avril 2023
    • L'équipe IDS 4 avril 2023
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